Les visages de Dieu

Dès que nous entendons le mot « Dieu », il nous vient forcément à l'esprit un ensemble d'images ou de représentations que nous tenons de notre culture, de notre éducation ou de notre histoire personnelle. Toutes ces images ont une influence plus ou moins consciente sur notre foi. Mais au fond, pour moi, qui est Dieu ?

Ainsi, au mot « Dieu », on associera par exemple l'idée de création, de toute-puissance, de protection, de salut, de jugement, de récompense, de tendresse, mais aussi d'interdit, de colère, de punition, etc.

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Points-clés

Prendre conscience que

• Les pensées et les chemins de Dieu échappent pour une large part à notre vision humaine et à notre compréhension. Découvrir qui est Dieu ne peut se faire qu’en acceptant de détruire nos préjugés et nos fausses représentations.. Si dans le christianisme Dieu se fait tout proche de l’homme, Dieu restera toujours au-delà de l’homme. On ne peut le mettre dans “notre poche”, ni le contenir. Il est toujours à découvrir et à rencontrer.
  

• On peut avoir des images de Dieu qui nous maintiennent loin de lui. Elles peuvent être liées à notre propre histoire ou être en lien avec des représentations extérieures.
  

• Nous sommes créés à l'image de Dieu. Mais prenons garde, en vertu de cette création, à ne pas nous faire un Dieu à notre image, ce qui le travestirait, l'affublerait de nos limites, voire de nos propres défauts. Veillons à ne pas conformer Dieu à nos attentes, qu’elles soient personnelles, familiales, claniques ou sociales.
  

• Si nous voulons savoir qui est Dieu, où est Dieu et comment il nous aime, regardons le visage de Jésus : «Qui me voit, voit le Père» (Jean 14,9). Le visage de Dieu se dévoile en Jésus. L’amour qu'il nous a manifesté est l'amour même de Dieu : un amour offert de manière inconditionnelle.
  

• Jésus est celui qui nous établit dans une juste relation à Dieu. Nous croyons en effet qu'avec Lui, en marchant à sa suite, nous sommes sur le chemin de la rencontre de Dieu. Il nous appelle à la fraternité en nous invitant à reconnaître, la puissance d'engendrement d'un Dieu que l'on peut appeler en toute confiance «Notre Père ».

1. La parole des couples

QUESTIONS

• Qu’est-ce qu’évoque le mot “Dieu”pour moi ? Quelles sont mes images de Dieu ? (négatives ou positives)

• Qu’est-ce que je vois vivre autour de moi au nom de Dieu ? Qu’est-ce qui m’attire ? Me rebute ? Me questionne ?

• Si Dieu existe, quelle place dois-je lui donner ? Qu’est-ce que j’attends de Lui pour ma vie ? Pour notre couple ?

• Qu’est-ce que la découverte de la vie de Jésus-Christ dans les évangiles me dit de Dieu ?

PISTES DE REFLEXION

• La révélation biblique contredit la représentation d’un Dieu tout-puissant : le Dieu d’Israël n’évite pas au peuple l’exil, la déportation ; même les justes connaissent la persécution. Quant au christianisme, il fait s’agenouiller ses fidèles devant un homme humilié et crucifié, ainsi que devant un petit enfant couché dans une mangeoire.Il bouleverse Hérode, jaloux de son petit pouvoir…
  

• L’enfant Jésus bouleverse des hiérarchies : les bergers sont les premiers à la crèche. Plus profondément encore, il bouleverse l’idée que l’on se fait de Dieu : un Dieu puissant, un Dieu qui résout les problèmes, un Dieu magique. La philosophie s’est interrogée sur cette puissance de Dieu ; la réponse est donnée par ce que dit Dieu de lui-même : un petit enfant, fragile, et qui, devenu adulte le restera, jusqu’à la croix. Dieu n’a pas réponse à tout et n’agit pas à notre place. Sa toute-puissance est une toute-puissance d’amour.
  

• Les anciens ont par tâtonnement et par touches successives essayé de dire leur compréhension de Dieu. Mais, si ces textes disent tous quelque chose de Dieu, pour autant Dieu ne se laisse pas enfermer dans nos représentations humaines. Les théologiens les plus savants ne reconnaîtront pas en Jésus le fils de Dieu que seule l’intelligence du cœur permet de découvrir.
  

• Le Dieu de Bethléem se remet aux mains des hommes. Ainsi, toute attitude religieuse qui éloigne Dieu des êtres humains, sous prétexte d’impureté des uns ou du caractère sacré de l’autre, contredit ce que Dieu montre de lui-même. Bien entendu, toute relation avec Dieu appelle le respect, mais celui-ci n’est en rien la distance exigée par l’idole, c’est plutôt la gratitude exprimée à celui qui se fait infiniment proche et aimant.

2. La Parole de Dieu

• La Bible est remplie d'exemples où l'homme se voit invité à quitter ses fausses images de Dieu. Dès le début du récit de la création, les textes nous montrent le mal engendré par notre incompréhension et notre manque de confiance en Dieu. (Genèse 3,1-7) Dans ce récit, la petite voix du serpent fait douter Adam et Eve de la bonté de Dieu. Cette petite voix en fait un dieu jaloux, qui se réserve des privilèges, qui se méfie de l'homme et le menace des plus lourdes punitions. L’image de Dieu s'en trouve ainsi complètement transformée. Dieu est imaginé comme un concurrent. La peur, alors, s'installe au cœur de l'homme et, avec elle, la disposition à la violence.
  

• Au cours de son histoire, le peuple juif a dû, lui aussi, convertir sans cesse ses représentations de Dieu. Il s’est souvent imaginé que Dieu se plaisait dans les sacrifices et les cérémonies pompeuses, mais les prophètes le lui ont rappelé : le seul culte qui plaît à Dieu, c'est le droit et la justice,la défense de la veuve et de l'orphelin (Isaïe 1, 10-17). Le peuple a souvent été tenté de se fabriquer des idoles (Exode 32,1-9) mais les prophètes, puis les disciples n’ont cessé de le mettre en garde (Ezéchiel 36, 25-31). Paul invite aussi les Corinthiens à fuir le culte des idoles (1 Corinthiens 10,14-21).
  

• La Bible révèle le visage d’un Dieu qui aime les hommes et cherche à faire connaître son amour. Dieu aime chacun personnellement même si on ne le connaît pas : « Tu as du prix à mes yeux et je t’aime » (Isaïe 43,4). « Une femme oublie-t-elle son enfant, même s’il s’en trouvait une pour l’oublier, moi je ne t’oublierai jamais, vois j’ai gravé ton nom sur les paumes de mes mains » (Isaïe 49,15).
  

• Jésus, tout au long de sa vie, a dénoncé toutes les perversions de l’image de Dieu et le mal commis en son nom. Ainsi, dans Jean 9,1, Devant un aveugle-né, les disciples interrogent Jésus : «Maître, qui a péché, lui ou ses parents, pour qu'il soit né aveugle?» (Jean 9,1). La question sous-entend que Dieu intervient dans notre existence comme la cause immédiate de ce qui nous arrive et que la maladie, à cet égard, peut-être une punition de Dieu s'étendant sur plusieurs générations. Jésus redresse ces fausses images.
  

• En marchant à la suite du Christ, nous sommes sur le chemin de Dieu : “Je suis le chemin, la vérité et la vie, répond Jésus à Thomas. Personne ne va vers le Père autrement que par moi. Si vous me connaissez, vous connaîtrez aussi mon Père.” (Jean 4, 6-7)
  

• « Qui m’a vu a vu le Père » (Jean 14,9-10). Le visage de Dieu se dévoile en Jésus et l'amour qu'il nous a manifesté est l'amour même de Dieu : un amour offert de manière inconditionnelle. Impossible d'éteindre l'amour de Dieu pour nous!
  

• Dieu se fait proche de tout homme et attend que celui-ci se tourne vers lui. Il manifeste sa discrétion et son grand respect pour la liberté de chacun. Il n’entre pas chez nous par effraction. Il ne fait violence à personne mais propose une relation d’amour : « Je me tiens à la porte et je frappe ; si quelqu’un entend ma voix et m’ouvre la porte, j’entrerai chez lui, lui près de moi, moi près de lui…. » (Apocalypse 3, 20).

3. La prière

Sur le visage de mes frères

Ô Seigneur, depuis que tu es venu chez nous,

Dieu, pétri de la même argile que nous, Dieu qui s’est fait visage en Jésus notre frère, Nul ne peut rencontrer l’homme, Sans découvrir en lui quelque chose de Toi. Toi, l’enfant de Bethléem, dans le visage des bébés souriants… ou pleurant Toi, le fugueur du Temple, dans le visage des adolescents qui ne savent plus s’ils sont hommes ou enfants. Toi, le tenté du désert, dans le visage des hommes tourmentés, partagés, déchirés, par le mal qui toujours se propose. Toi, le transfiguré, dans le visage des hommes en prière, Toi, le condamné défiguré, dans le visage des hommes torturés, Toi, le ressuscité, dans le visage de ceux, en qui l’amour enfin a fait toute sa place Je voudrais Seigneur, continuer fidèlement, ce pèlerinage inachevé vers le visage de mes frères, Jusqu’au jour de joie, où tous dans ta lumière enfin, les contemplant, je te contemplerai. Mais il me faut encore, avec Toi, longuement, durement cheminer et mieux te connaître pour mieux te reconnaître sur le visage de mes frères.

D'après une prière de Michel Quoist